A quatre sur un Doigt

le 14 juin 2017 , par Gilles DIEUMEGARD , 1288 vues

L’équipe initiale accablée par les blessures et la surchauffe, la version 2017 du projet était aussi un peu compromise par les conditions constatées lors d’un repérage un gros mois auparavant. En conséquence : pas trop de choix dans la date, reprise du « vieux » projet de 2016, voie en roche et neige, le Doigt de Dieu, pic central de la Meije.

Départ de Grenoble à 7h (Olivier, Damien A, Lukas, Benoît V), arrivée à Villar d’Arène à 8h30, mise en route à 9h30, après une sombre affaire de lunettes noires. Au pas de guide de Damien, on avale sûrement les 800 premiers mètres, avant de commencer à voir la neige molle vers 2700. La petite arête et la vire Amieux sont quasiment dépourvues de neige ; l’an passé à la même époque, c’était bien différent… Le glacier jusqu’à l’Aigle est mou. On avance sans crampons, en T-shirt (manches courtes, pas bien!). Au refuge, trois trios nous rejoignent, dont un qui a amené une tente… 

Dérogeant à notre habitude, nous sommes en week-end « sec » : pas de vin, pas de bière, pas de génépi : les 1800m de déniv, et le souvenir d’une bien mauvaise nuit un an auparavant, nous assagissent… au menu : chanterelles du Vercors, jambon, purée, soupe (et un flan raté en dessert mais bon). Certains trouveront que le fond de purée dans la tisane du soir est de trop (d’autres que c’est une bonne manière de faire la vaisselle). Le paysage est toujours magnifique depuis ce refuge, lui-même bien confortable, surtout qu’il fait vraiment doux. 

Le lendemain, départ effectif à 5h30. Après l’approche jusqu’à la tête des Corridors, nous sommes passés sur la gauche de la rimaye, qui était trop ouverte et cornichée au centre. La pente de neige au-dessus était en faite une fine couche de neige molle sur de la glace. Initialement partis en corde courte pour cette pente, nous sommes finalement montés en traversée en tirant des longueurs jusqu’aux ilôts rocheux puis droit sur l'arête dans une longueur mixte avec des rochers peu stables (coinceurs). À la réflexion, il aurait mieux valu tendre d’emblée une longueur complète depuis la rimaye en posant des broches : une partie de la pente était en glace et nous aurions pu deviner que la couche de neige alentours était trop fine. On le saura pour une prochaine fois. On a un peu guenillé dans la glace mais c’était instructif.

L'arête se traverse rapidement. Le ressaut raide en « 3b/3c » selon les topos est un peu plus corsé que ça, avec un rocher globalement compact (protections sur petits coinceurs) sauf pour les "bonnes prises" qui sont en fait des rochers instables. Pierre décide d’aller voir ce qui se passe vers le vallon des Etançons, petite frayeur passagère et grosse prudence par la suite. Lukas domine la difficulté et pose des coinceurs bétons (plutôt les petits). Il y a pas mal de relais installés dans ce ressaut (et un vieux friend coincé, et quelques pitons). Dans cette facette, en partant à gauche dans une petite dalle (attention à la grosse écaille qui semble prête à tomber sur les copains en-dessous…) on rejoint une terrasse plein de gros cailloux (avec un relais chaîné), puis une vire ascendante facile en face Sud (jolie vue!) qui termine par un pas de quatre mètres de haut en rocher bien prisu mais aussi bien instable. Sommet !
On s’y rejoint tous pour une petite photo avec vue sur le Grand Pic à côté, puis on pose le premier rappel, sans être certains d’où il va nous mener.

Nous avons déployé quatre rappels successifs pour redescendre : depuis le sommet, environ 20m jusqu'à un relais sur pitons suspendu dans la face nord rocheuse, puis un de 30m rejoignant en diagonale le relais du bout de l'arête (au pied du ressaut rocheux), suivi par 25m dans la neige sans repasser par l'arête, menant à un dernier méga-relais 45m au-dessus du point haut de la rimaye (il faut donc tirer à gauche après 20m de neige). Pour la fin, les 50m sont nécessaires pour franchir la rimaye (petit passage sympa en fil d’araignée sur 3m entre la lèvre supérieure de la rimaye et son bord inférieur, attention aux acrobaties... n'est-ce pas Olivier).

Redescente dans la soupe crevassée. Damien avait mis le pied dans une crevasse à la montée, c’est Benoît dans une autre qui secoue ses crampons dans le vide à la descente. Pied gauche, ça porte chance?

Au retour, on se fait un thé au refuge et on avale le pique-nique vers 13h. Puis on redescend en s’enfonçant jusqu’aux cuisses. Trempés. Les baskets étaient planquées dans un pierrier vers 2500, on s’essore les chaussettes avant de changer de pompes… une bière en vitesse à la Grave pour souffler, puis retour à Grenoble à 19h30, plus ou moins à temps pour voter…

 

 

 

Vous n'êtes pas autorisé à mettre des commentaires